Le village fantôme de Bussana Vecchia sur les hauteurs de Sanremo
Bussana Vecchia est un village témoin à plus d'un titre, témoin en premier lieu du terrible cataclysme qui ravagea son espace, détruisant nombre de maisons, en quelques secondes…
Un petit resto à l'entrée du village
Si le village retrouva la vie après avoir été un pâle spectre, il le dut à des artistes idéalistes qui y créèrent une communauté utopiste sans propriété privée où tout n'était que partage, création pour la beauté du geste…Puis vinrent les dissensions et la fin du rêve…
Oeuvres d'artiste dans les murs du village
Retour aussi des descendants des habitants sinistrés venus réclamer leur droit à vivre dans leur maison familiale…Et enfin, la spéculation immobilière et les embrouilles juridiques... Comme pour la principauté de Seborga au dessus de Sanremo, l'état italien ne reconnait plus le village.
Malgré tout, l'ambiance qui se respire à Bussana Vecchia est loin d'être celle des autres villages ligures de la région; même si la vie a repris, quelque chose s'est arrêté là, suspendu dans l'instant.
Ruelles et voutes dans le village
Bussana Vecchia se situe à quelques kilomètres de la frontière française. Il appartient à la ville de San Remo, dans la province d’Imperia. Il est devenu un village fantôme en 1887 à la suite d’un tremblement de terre d’une intensité de 10 sur l’échelle Mercalli, qui causa la mort de 2.000 personnes (Les Alpes Maritimes furent touchés aussi, avec 8 morts et 51 blessés).
En Hiver, la plupart des ateliers d'artiste sont fermés
Plantée sur un promontoire, coincée entre la mer et les Alpes ligures, la cité possède une destinée singulière qui a basculé le 23 février 1887 dont il porte encore les stigmates et qui lui donne toute son authenticité.. Ce jour-là, un tremblement de terre ravage les constructions fragiles de Bussana, village du IXe siècle (Probablement fondé sous l'Empire Romain et nommé Armedina ou Armedana).
La plupart des édifices furent sévèrement endommagés et le village fut jugé comme inhabitable. Les autorités décidèrent de le reconstruire sur un nouveau site appelé Bussana Nuova (Nouveau Bussana), abandonnant définitivement le vieux village en 1894, tous ses bâtiments étant déclarés dangereux.
Une accordéoniste se fait filmer
Rien n'était plus gai et plus gracieux que ce paradis de vignobles, d'orangers et de violettes. Qui aurait cru, quelques instants auparavant, alors que le jour se levait, que tout allait être ravagé. La secousse a été d'une violence inouïe, détruisant presque entièrement le village.
Piemontesina bella, lontano andrò, dove non so, parto col pianto nel cuor, dammi l’ultimo bacio d’amor !
C'était le premier jour du Carême, à 6 heures 25 du matin, une secousse de 20 secondes d'une extrême violence causa destructions et morts immédiates dans tout le village. Une grande partie de la religieuse population se trouvait dans l'église où elle suivait la messe. L'effondrement du mur en face de la façade de l'église avisa la congrégation du danger et beaucoup cherchèrent refuge dans les chapelles latérales.
un resto naturale dans les ruines avec des plats vegan
Mais une autre réplique fit s'écrouler le lourd toit en voûte de l'église, tuant un certain nombre de personnes. La presque totalité des habitations de la partie haute située autour du château est détruite, ensevelissant une centaine de personnes. Les maisons des deux côtés de la Via Rocca et de la via della Volta sont complètement écroulées.
Ruine de l'église Sant’Egidio
Plus de 100 personnes restèrent prisonnières de la partie nord des Rocche quand les voûtes en arc s'écroulèrent bloquant les accès et coupant donc les issues. Dans les petites ruelles avoisinantes, c'était un spectacle de désolation : pans de murs branlants prêts à s'effondrer, poutres, objets divers de la vie quotidienne et familière réduits à de pitoyables et dangereux vestiges après la tempête.
Le sauvetage se révéla difficile et très périlleux étant donné l'état précaire des murs tenant par miracle et menaçant de s'écrouler à tout instant et la fréquence des répliques. La seconde fit s'effondrer des ruines, ensevelissant des sauveteurs. L’horreur était à son comble….
Encore un atelier fermé...la magia di Bussana
Au début des années 1960, un groupe d’artistes "idéalistes" décidèrent de s’y s’installer afin de vivre simplement et d’y produire des oeuvres. Malgré le manque d’électricité et d’installations sanitaires, la nouvelle communauté s’agrandit pour atteindre 30 personnes vers 1968, pour la plupart des artistes hippies ou beatniks venus de toute l’Europe du nord principalement.
Ruelle montant au château qui est en ruine
Un village international d’artistes était né et, malgré des confrontations périodiques avec les autorités, la communauté y vit encore, vendant ses œuvres aux touristes de passage et organisant des événements artistiques.
Vue de Bussana Vecchia sur la mer ligure
Nous avons donc pris la route de Bussana Vecchia. En partant de la nouvelle ville, elle serpente dangereusement sur 5 kilomètres. Si vous savez user de votre klaxon et conduire sur une route de la largeur d’un trottoir, vous arriverez tout en haut vivants. Il faut arriver à trouver une place pour la voiture sur le bas-côté et ensuite finir à pied.
Un résident nous a invité pour voir le panorama de sa terrasse...Grazie mille Luigi
D’un coup, les villas laissent place au vieux village, son dédale de rues pavées, ses magasins d’artistes, ses maisons retapées de bric et de broc et dévorées par le lierre, son petit café, et son église (San Egidio) dont on pourrait penser qu’elle a été bombardée, puis mise à sac.
Pas une voiture, pas un scooter, un calme absolu au milieu des chats, probablement les habitants les plus nombreux. Un véritable voyage dans le temps. Et tout en haut, un jardin botanique. N’hésitez pas à payer le droit d’entrée (2 euros, à moins que la crise touche aussi la babacool-sphère).
Là-bas, vous trouverez des plantes grasses dans tous les coins, un musée retraçant l’histoire de Bussana et celle du Village International des Artistes avec le visage des premiers « colons », et, tout en haut, sûrement la plus belle vue du village. Devant vous, le clocher de l’église San Egidio qui fait face à la mer, et derrière vous, les Alpes ligures.
Oratoire de Giovanni Battista en ruine
Rien que pour ça, merci d’avoir ressuscité Bussana. Ici, pas de titre de propriété et c'est le système D de ses habitants qui ont fait le reste. L'électricité ? Pas de problème, on va se repiquer sur le dernier poteau qui se trouve à la sortie du village. Pour l'eau pas de soucis, on installe des cuves de récupération d'eau de pluie sur les toits et les terrasses.
L'aménagement après la reconstruction des ruines ? Que de la récupération... Vous avez même l'impression que fourneaux, matériel de cuisine, mobilier viennent tout droit d'un musée d’antan. Pas de volets aux fenêtres qui restent telles des yeux qui ne se refermeraient plus devant tant d'horreurs, comme écarquillées éternellement...
Pas de toits en tuiles, que des terrasses...Aucun crépi, de la pierre brute. Pas d'oratoire ni de statues, les niches restent et demeurent vides… Pas d'odeur de cuisine si alléchantes ailleurs… Les gens qu'on croise semblent être de visite ou attendre le chaland. Le village semble n'aspirer qu'à une chose : retrouver une paix qui se fait attendre…
*Suite aux premiers tremblements de terre d'une certaine ampleur, les habitants décident de renforcer les habitations en construisant les typiques arches qui réunissent à hauteur du 1er ou 2ème étage les habitations qui se font face de chaque côté des étroits.
Ici vit une communauté hippies
Ces arcs maçonnés, appelés arcs de contraste ou arcs de confortement (archi di contraspinta) vont de point dur à point dur, c'est à dire de plancher à plancher ou de mur de refend à mur de refend.
On vit au milieu des oies, poules et cochons...
Technique très répandue en Ligurie et dans les Alpes Maritimes, elle offre une relative souplesse et permet une meilleure transmission des contraintes horizontales au niveau des planchers. Les immeubles deviennent ainsi un ensemble de blocs dynamiques et plus des blocs isolés.
DIAPORAMA BUSSANA VECCHIA